Centre National d’Histoire des Sciences - Nationaal Centrum voor de Geschiedenis van Wetenschappen

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mardi 18 septembre 2012 par Matta

F) QUELQUES REFLEXIONS

Comme les eaux de Bourbonne sont très-énergiques, on ne les croit pas indifférentes ; et le préjugé est qu’elles font du mal, quand elles ne font pas de bien. Ce n’est pas l’avis du docteur Juvet, qui prétend qu’on s’y baignerait, comme dans l’eau commune ; ce qui peut être vrai.

Je n’ai garde de disputer l’efficacité constatée de ces eaux ; mais en général les eaux sont le dernier conseil de la médecine poussée à bout. On compte plus sur le voyage que sur le remède. A cette occasion, Je vous dirai qu’un Anglais hypocondriaque s’adressa au docteur Mead, homme d’esprit et célèbre médecin de son pays. Le docteur lui dit : « Je ne puis rien pour vous, et le seul homme capable de vous soulager est bien loin - Où est-il ? - A Moscou ». Le malade part pour Moscou ; mais il était précédé d’une lettre du docteur Mead. Arrivé à Moscou, on lui apprend que l’homme qu’il cherchait s’en était allé à Rome. Le malade part pour Rome, d’où on l’envoie à Paris, d’où on l’envoie à Vienne, d’où on l’envoie je ne sais où, d’où on l’envoie à Londres où il arrive guéri. Les eaux les plus éloignées sont les plus salutaires, et le meilleur des médecins est celui après lequel on court et qu’on ne trouve point.

Si le voyage ne guérit pas, il prépare bien l’effet des eaux par le mouvement, le changement d’air et de climat, la distraction. Celui des eaux de Bourbonne est quelquefois très-prompt ; quelquefois aussi il est lent, et ne se fait sentir que plusieurs mois après qu’on a quitté le lieu. C’est un espoir qui reste à ceux qu’elles n’ont pas soulagés. Ils se flattent de rencontrer au coin de leur foyer la santé, qu’ils sont venus chercher ici. Que les hommes s’en imposent facilement sur ce qui les intéresse. Les eaux de Bourbonne commencent souvent par accroître le malaise, un malade perd et recouvre alternativement l’espoir de guérir.

J’ai demandé pourquoi on n’usait pas à Bourbonne des bains de vapeurs. On m’a répondu qu’ils donnaient des vertiges sans aucun soulagement. Mais il y a quinze à vingt ans. Qui sait si la nature des eaux est aujourd’hui précisément la même ? Si les vapeurs seraient aussi infructueuses ? Si les premières tentatives ont été bien faites ? Rien de plus difficile qu’une observation, une expérience dont on puisse conclure quelque chose. On ignore le nombre des essais nécessaires pour en constater la généralité et la constance. Le phénomène qui a lieu dans un instant n’a pas lieu dans l’instant qui suit.

Combien un homme éclairé sous la direction duquel seraient ces bains et les autres du royaume, y tenterait d’expériences. On fait à l’imitation de nature des bains purement artificiels. Combien l’art et la nature combinés n’en fourniraient-ils pas par l’intermède des sels mêlés aux eaux et par la variété des plantes qu’on y ferait pourrir. Combien de qualités diverses ne pourrait-on pas donner aux boues. Mais, il faudrait que l’art cédât à la nature tout l’honneur des guérisons. Les bains seraient décriés, si l’on venait à soupçonner que l’industrie de l’homme eût quelque part à leur effet. On croirait ne quitter un médecin qu’on aurait à sa porte, que pour en aller chercher un plus éloigné. 0 hommes. 0 race bizarre.


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