Centre National d’Histoire des Sciences - Nationaal Centrum voor de Geschiedenis van Wetenschappen

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lundi 26 septembre 2011 par Matta

Ces informations ont jusqu’ici retenu l’attention des historiens, des juristes et des folkloristes, mais jamais des biologistes. Or les seuls Anoures susceptibles de coasser au point d’empêcher les gens de dormir, dans nos régions, ne peuvent être que les Grenouilles vertes (Rana esculenta et R. lessonae) et la Rainette (Hyla arborea).

Les archives et les traditions relatives au droit de battage de l’eau peuvent donc présenter un intérêt historique pour l’établissement des cartes de répartition. Dans tous les cas cités plus haut pour le Nord-Est de la France, leur intérêt reste limité, car des Grenouilles vertes existent toujours sur le territoire des communes citées. Mais, en Belgique, pour l’Ardenne et pour la Lorraine, il peut en être tout autrement car dans ces deux régions, la raréfaction ou la disparition, au moins locale, des Anoures et des deux ou trois espèces citées plus haut en particulier, a pris des proportions alarmantes (Parent 1981-1982, Parent 1983).

Si l’on considère que la Rainette est pratiquement éteinte en Wallonie et que la Grenouille verte a sans doute toujours été très rare et localisée en Ardenne, on doit convenir de l’intérêt évident de tels documents.

L’un des documents relevés jusqu’ici ne me paraît malheureusement pas fiable. Dans la notice que Couvet, instituteur communal à Sainte-Marie, près de Neufchâteau, avait consacrée en 1877 à sa commune et qui est reproduite en partie dans l’ouvrage bien connu d’Emile Tandel (1893 : 200-201), on peut lire : « Ici aussi se retrouve la légende des vassaux battant la nuit les étangs afin de faire taire les grenouilles. Les habitants de Sainte-Marie semblent avoir patiemment accepté cette corvée, car on leur a donné le nom, qu’ils conservent encore aujourd’hui, de Balaux, par corruption des mots battre l’eau  ».

Couvet rapporte également l’existence d’un château, au lieudit « laidai », mais on n’en a retrouvé aucun vestige. Hector (1951 : 182) a donné une tout autre interprétation au mot « balau » qui dériverait, selon lui, de balastrum ou balaustrum, colonne. Le relais de poste de Sainte-Marie était orné de piliers avec chapiteaux et le sobriquet donné aux habitants pourrait en dériver, mais avec le temps, on en aurait oublié la signification et on aurait inventé celle du château.

Une autre interprétation du mot « balau » a été proposée par Bourguignon (1938 : 89) qui y voit soit une altération de « baloue », « balouge » , nom wallon du hanneton, soit une forme du mot « balourd », c’est-à-dire gauche, maladroit, sobriquet visant à «  railler l’attitude et les gestes des natifs du lieu », mais en rapport éventuellement avec le battage de l’eau, qui concernait, selon Bourguignon, le hameau de Ourt, qui dépendait de l’abbaye de Saint-Hubert.

En attendant que l’on trouve de nouveaux arguments en faveur de l’une ou de l’autre thèse, il vaut mieux ne pas retenir cette donnée.

Récemment, en réaction contre les affirmations téméraires de Pernoud (1977), Remacle (1980) a rappelé un texte de 1464 qui avait déjà été publié par Poncelet et alii (1958 : 370) et qui signale de manière incontestable l’application de ce droit à Wanne (H 8-11) [3], au profit de l’Abbé de Stavelot.

Dejardin (1891) avait également relevé l’expression « battre l’eau » pour la région de Liège, de Namur et de Mons et pour Xhoffer (Jalhay, F 8-52). De même Haust (1933) la cite pour La Gleize (G 7-48).

Herbillon (1981) cite d’autres documents écrits qui concernent les villages suivants : Biesme (H 5-12/22), Anseremme (H 5-57), Meix-le-Tige (M 7 -16) (cette dernière donnée après Tandel 1889, vol, II : 497- 498). Un autre texte, mais qui ne se rapporte pas vraiment au battage de l’eau, concerne Ermeton-sur-Biert (H 5-34).

Il me paraît significatif que seule la présence de grenouilles vertes à Anseremme et à Meix-le-Tige m’était connue (Parent 1979). Ceci démontre amplement l’opportunité de rechercher d’autres documents du même genre qui existent vraisemblablement, car on présume que ce droit féodal a dû être fort répandu.

Références

C. Beauquier, 1909 (et 1910). - Faune et Flore populaires de la Franche-Comté (Collections de Chansons et de Contes populaires, tomes 32 et 33). Volume I : La Faune ; volume II : La Flore. Paris, Leroux 2 vol. : 404 + 409 p.

A. Benoit, 1892. - Etude gastronomique et historique sur les grenouilles en Alsace - Lorraine. Revue d’Alsace, 43 : 508-520.

M. Bourguignon, 1938. - Le blason populaire luxembourgeois. Cahiers Académie luxembourgeoise (Arlon), 1938 : 27-104.

A. Calmet (Dom -), 1756. - Notice de la Lorraine. Nancy, in folio.

Couvet, 1893. - Notice sur la commune de Sainte-Marie-Chevigny in : Em. Tandel : Les Communes luxembourgeoises, volume VI A : Arrondissement de Neufchâteau, Arlon ; 764 p. (cf. p. 200-201).
[Notice rédigée en 1877. Egalement publié dans Ann. Inst. Archéol. Luxemb., XXVI, retirage 1980 : Bruxelles, Edit. Culture & Civilisation.]


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