En 1763, lorsqu’on creusa les fondemens des bains, on découvrit un ancien bassin de construction romaine. Il était fait de briques larges d’un pied, en carré, épaisses d’un pouce, et liées comme on le voit aux ouvrages de ces maîtres du monde. Ce bassin était octogone. Les fondemens et le pourtour étaient à la romaine. Il se vidait par le fond, à l’aide d’un canal creusé sur sa circonférence, et aboutissait à un aqueduc qui versait les eaux de ce bassin dans la rivière d’Apance, qui traverse la prairie hors de Bourbonne et qui se rend dans la Saône.
Le ruisseau qui passe dans ce lieu s’appelle le ruisseau de Borne. Il est constant qu’il y a eu à Bourbonne des fontaines salantes. Il y a dix-sept ans, que des particuliers de la rue des Bains les rencontrèrent en creusant un puits. Elles parurent en abondance, et très-chargées de sels. En un instant, elles atteignirent le haut du puits et se répandirent. Les habitants se hâtèrent de combler ce puits, dans la crainte qu’un établissement de salines n’entrainât la destruction de leurs forêts et une surcharge d’impôts.
Dans une fouille qu’on fit, il y a environ quinze ans, derrière l’hôpital, on tomba dans de petits appartements pavés en mosaïque de faïence, avec des murs ornés de peintures ; les habitans d’un village sont trop ignorans pour qu’on puisse leur reprocher de n’avoir mis aucun prix à cette découverte.
Il y avait au milieu d’un de ces petits appartemens, bains ou autre chose, à terre, des ustensiles de cheminée, pelle, pincettes, chenets, crémaillère avec un vase d’airain.
Bourbonne fit autrefois partie du domaine royal. L’aliénation date de 1674. Le premier seigneur fut un M. Colbert de Terron. Celui d’aujourd’hui est président à mortier au parlement de Dijon. Il s’appelle M. Chartraire de Bievre
En 1314, les eaux payaient six livres pour tout droit seigneurial. Elles sont à présent affermées quinze cents francs et rendent environ deux mille quatre cents livres aux fermiers qui sous-louent aux distributeurs d’eau, qui y trouvent apparemment leur compte.
Il y a environ cinq cents feux et trois mille habitans à Bourbonne.
Les malades y dépensent, une année dans l’autre, cinquante mille écus, cependant les habitans sont pauvres. C’est que de ces cinquante mille écus, il y a plus de cent mille francs qui sortent du finage ; c’est que l’argent qui tombe dans un endroit ne l’enrichit point, lorsqu’il fait un bond pour aller trouver ailleurs les denrées de consommation ; ceux qui apportent à Bourbonne ces denrées, s’en retournent avec l’argent des malades dans leur bourse. L’argent ne reste pas où il est déboursé. Les terres rapportent peu. Celles qui entourent les eaux ne sont pas la propriété du village, qui est un lieu nouvellement fait. C’est cependant un gros marché à grains. Je ne m’en suis pas aperçu, parce qu’on ne vend point de grains, quand il n’y a point de grains.
C’est le prévôt de maréchaussée de Langres qui fait la police à Bourbonne pour le gouvernement. C’est une affaire de vingt-cinq louis pour lui, et il est aux ordres du ministre de la guerre. Il peut servir pour le logement et pour les vivres. C’est à lui qu’il faut s’adresser : mon condisciple Maillardet est un galant homme qui cherche à se rendre agréable, et qui y réussit.
Il y a un hôpital militaire tenu par des religieuses de l’ordre de Saint-Augustin, une paroisse, et des Capucins.
Le jardin des Capucins est ouvert aux malades de l’un et de l’autre sexe, et sous ce prétexte il est public. Les femmes traversent le monastère pour s’y rendre. Ces pauvres moines envoient des fleurs et quelques fruits aux étrangers, manière simple d’appeler une aumône honnête. C’est leur métier.
Un bourgeois de l’endroit et le directeur de l’hôpital ont établi ici une manufacture de faïence. La terre qu’ils emploient résiste bien au feu, et l’émail s’y attache facilement. On n’y fait encore que des ouvrages communs ; et tant mieux pour les entrepreneurs s’ils s’en tiennent là.